Fernand Braudel associe l’archipel de Malte à l’île des trésors : « Si les îles sont toujours des îles à trésors, des trésors qu’il faut retrouver, Malte obéit à la règle ; elle l’établirait même à elle seule. »
Par Nacer Boudjou
Depuis la nuit des temps, cet ensemble d’îles : Gozzo (Ghawdex), Camino (Kemmuna) et Malte n’a point cessé d’attirer des navigateurs phéniciens, grecs, romains… D’innombrables vestiges archéologiques attestent de leur présence. Néanmoins, les historiens ou les voyageurs du moyen âge, ne furent pas du même avis que Braudel sur la richesse possible que recèle cette île aux trésors. Ibn Hawqal nota « Au nombre des îles célèbres et inhabitées de la Méditerranée, on compte Malte, située entre la Sicile et la Crête, où vivent encore de nos jours des ânes sauvages et des moutons en très grand nombre. On y trouve aussi du miel ».
Aujourd’hui, Malte est le plus petit pays à adhérer à l’UE en 2004, Malte, qui compte près de 400 000 habitants, dispose déjà d’une économie développée. Le tourisme est le premier secteur d'activité, il emploie un tiers de la population active, soit 30 000 personnes. Près de 1 200 000 touristes se rendent chaque année dans l'île, dont 80 % de Britanniques. Malte est devenu également un lieu privilégié pour les séjours linguistiques, et de nombreux lycéens et étudiants étrangers viennent y apprendre l'anglais
Des occupations successives de cet archipel font une synthèse de tous les apports culturels. Les plats traditionnels, les coutumes populaires, l'architecture des maisons s’apparentent à ceux de l’Afrique du Nord. Les arts plastiques et la musique sont plus proches des traditions italiennes; le thé à 8 heures du matin et de 5 h de l’après-midi est une habitude héritée des Anglo-saxons.
Quand les Aghlabides et les Chevaliers ont fait de cette cité une forteresse imprenable
Son fondement date de l’occupation de l’île, de 870 à 1090 de notre ère par les Aghlabides, d’origine tunisienne, venus de la Sicile sous la conduite de Mohamed Ibn Khadafcha. Plusieurs éléments témoignent de leur présence, les remparts de la Médina, Fort San Angelo, la présence de mots arabes dans le Maltais, le port de la ‘’faldetta’’ par les femmes, les maisons blanches cubiques à terrasses, les techniques agricole. La latinisation de l’île commença avec la conquête normande de 1090, par l’introduction des éléments siciliens dans la langue locale.
L’ordre des Chevaliers Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem s’installa à la Valette en 1522, à l’initiative de Charles Quint, après les déboires subis en Syrie et à Chypre. Ils bâtirent La Città di Malta sur une colline au centre de l’île, qui n’était qu’une petite cité médiévale défendue par des murailles, dans laquelle vivait l’évêque et où siégeait le conseil de la commune (l’Université).
La Valette pratique le commerce de redistribution de blé, surtout pendant les périodes de disette liées aux grands conflits mondiaux. Son port est sans conteste le port charbonnier, l’escale principale sur la nouvelle route des Indes ouverte en 1840 à travers la Méditerranée. Il est la jonction de la Grande Bretagne et de l’Egypte reliées par des bateaux à vapeur.
Gorg Zammit, une vocation trilingue et triculturelle
La Valette a brillé de tout temps par sa littérature. Une quantité d’œuvres écrites dans toutes ces langues ont vu le jour, telle la poésie d’expression arabe, née dans l'archipel durant le règne des Aghlabides et dont Abd Allah Ibn As Samanti, Utman Ibn Ar-Rahman, surnommé As-Susi, Abu Al Qasim Ibn Ramdan Al Maliti, sont les plus représentatifs. La littérature maltaise en langue italienne s’est pourtant taillée la part du lion. Le premier écrivain maltais en langue italienne, Franceschino da Malta composa des sonnets célèbres. Une kyrielle d’auteurs maltais d’expression anglaise a publié des œuvres romanesques : Cuze Aquilina, Daniel Massa, Victor Freneche et aussi Francis Ebjer, qui est sans doute l’auteur le plus apprécié et le plus connu en dehors des frontières de son pays.
Mais le poète maltais qui synthétise le mieux cette vocation trilingue et triculturelle de la littérature maltaise, reste Gorg Zammit. Il a débuté son activité littéraire avec l’utilisation de des langues anglaise et italienne, pour devenir plus tard un poète d’expression maltaise de grand talent. La littérature maltaise actuelle est écrite en langue maternelle et nationale. Elle est le lieu de rencontre pacifique de trois cultures : Nord africaine, Latine, et Anglo-Saxonne et qui a intégré ce peuple Européen et Méditerranéen. « Pour résumer, on pourrait dire que la littérature maltaise depuis 1990 est l'expression d'une petite nation s'efforçant de se maintenir à un niveau européen afin de conserver une certaine importance sur le plan littéraire. Si les géants sont peu nombreux, des auteurs talentueux, dont les voix méritent d'être écoutées, suivent leurs traces. » écrit Charles Briffa, homme de lettres maltaises.