|
|
|
|
|
CARTHAGE
17/03/2005 17:05
Deux martyres berbères chrétiennes Sainte Perpétue et Sainte Félicité
La fondation de Carthage par la princessse tyrienne Didon selon la légende, remonte a environ 2825 ans. Très vite Carthage devint la capitale d'une république puissante. Carthage a connu de longues luttes contre les romains, luttes plus connues sous le nom de guerres puniques (de 264 à 146 avant notre ère). Lors de la deuxième guerre punique, malgré une chaude lutte du général carthaginois Hannibal, Carthage demanda la paix aux romains commandés par Scipion l'Africain. Carthage fut incendiée et détruite par les romains commandés par Scipion Émilien à la fin de la troisième guerre punique. Au 1er siècle avant notre ère, Carthage fut définitivement conquise par les romains, elle devint la capitale de l'Afrique romaine et de l'Afrique chrétienne. En 439 elle a été prise par les vandales et en 698 elle a été anéantie par les arabes. Carthage est un lieu de pélérinage chrétien que les catholiques ferryvillois et bizertins faisaient en l'honneur de deux martyres berbères chrétiennes sainte Perpétue et sainte Félicité, misent à mort dans les arênes de Carthage en 203.
 La cathédrale,  Le parvis de la cathédrale  Musée de Carthage installé dans l'ancien scholasticat des pères blancs, près de la cathédrale 1958 Arène de Carthage, cérémonie célebrée par Monseigneur Maurice Perrin , Primat d'Afrique, en l'honneur de deux martyres berbères chrétiennes Sainte Perpétue et Sainte Félicité, misent à mort (dévorées par des lions) dans cette arène en 203 de notre ère, pour avoir refusé de renier leur foi chrétienne.

Arène de Carthage. D'après Monseigneur André Colini qui est derrière Monseigneur Maurice Perrin, Primat d'Afrique, cette procession en l'honneur des deux martyres berbères chrétiennes, Sainte Perpétue et Sainte Félicité, est celle de 1958. Les scouts que l'on peut apercevoir seraient de la troupe de Bizerte (mais Bertrand n'est pas sûr)
| |
|
|
|
|
|
|
|
Quand les femmes subissent de mauvais traitements... d'autres femmes
17/03/2005 11:18
|
La Journée internationale de la femme a notamment été marquée dans la commune par une conférence animée par Mme Camille Lacoste-Dujardin, ethnologue. |
Pour marquer la Journée internationale de la femme, une rencontre organisée en partenariat avec la municipalité de Haucourt-Moulaine, la coordination des berbères du bassin de Longwy, la MJC, les clubs de football olympique et de prévention adéquat, a été proposée au public. Cette conférence avait pour thème: "Les mères contre les femmes", un sujet qui demeure peu abordé et qui a été présenté par Mme Camille Lacoste-Dujardin.
D'habitude, la femme subit de mauvais traitements de par l'homme, cependant, Mme Lacoste-Dujardin a démontré qu'elle en subit aussi par des personnes du même sexe, en l'occurrence sa mère ou sa belle-mère dans les sociétés nord-africaines, kabyles en particulier. L'ethnologue Camille Lacoste-Dujardin avoue que c'est la femme elle-même qui reproduit sans cesse le système répressif, maintenant la gent féminine dans une sorte de tension déraisonnable.
Directrice de recherche au CNRS, spécialiste de l'ethnologie arabo-berbère, elle s'appuie, pour parler de ce thème, sur ses connaissances approfondies sur la langue kabyle, et de ses publications: Le Conte kabyle, et Dialogue de femmes en ethnologie. En plus, elle a passé sept années dans le Djurdjura, en Kabylie, un séjour qui lui a permis d'apprendre beaucoup de choses.
Dans son introduction, elle relève les observations les plus perceptibles de cette relation entre les deux sexes: "Que de contradictions invraisemblables dans les relations entre les hommes et les femmes de la Méditerranée! Contradictoire, l'attitude des hommes à l'égard des femmes, tantôt les méprisant, les bafouant, les aliénant, tantôt les adorant, mais toujours les redoutant.>
Les ordres de la belle-mère
Camille Lacoste-Dujardin dit en outre que c'est la mère qui se charge du choix d'une femme pour son fils. Le monde hermétique des femmes ne peut être exploré que par une femme pour en comprendre le fonctionnement. Ainsi, marier son fils, c'est aussi embaucher une nouvelle employée, voire une servante pour les tâches ménagères, placée sous ses ordres. C'est donc la soumission et des pratiques magiques ineffables tendant à répudier la bru, à la faire détester par son mari qui sont mises en pratique. Une lutte acharnée et sans fin est ainsi engagée: "C'est contradictoire que les apôtres zélés de cette domination masculine, les artisans de son inculpation se trouvent être des femmes elles-mêmes, et surtout des mères.>
Si les hommes, pendant les rites du mariage et des festivités protocolaires qui leur sont attachées, s'occupent des formes et des contours officiels, les femmes, et particulièrement la mère du jeune marié, jouent un rôle prépondérant dans "la conception et les modalités du mariage. Femmes de savoir et d'expérience, elles ont la position stable, assurée au sein du matrilignage, grâce à la maternité de plusieurs garçons(...) Elles tiennent certains hommes sous leur dépendance et leur influence sur leurs fils".
L'originalité de la conférence de Mme Dujardin réside dans la place importante souvent hégémonique prise par la mère dans les sociétés maghrébines en faisant marcher l'engrenage de la machine familiale à leur guise.
Nacer Boudjou, Républicain Lorrain 17 03 05 |
| |
|
|
|
|
|
|
|
Mouloud Mammeri
08/03/2005 18:34
Le Soir d'Algérie 3 Mars 2005 MOULOUD MAMMERI Anthropologue et universaliste
Mouloud Mammeri aimait à répéter que la vie se nourrit de vérité. Confronté à l’occultation de son histoire et de ses racines, il a fondé son action essentiellement sur la quête des origines de son peuple et s’est attelé à pourfendre les inquisiteurs et confondre les menteurs en assenant ses vérités : la vérité : “Nos ancêtres ne sont pas les Gaulois” et “la nation algérienne n’est pas née au VIIe siècle”. C’est par le biais de la recherche scientifique qu’il entendait redonner à son peuple sa dignité. Il s’est investi dans cette voie à tel point que l’anthropologue a relégué au second plan l’écrivain si l’on en juge par l’immense contribution qu’il a apportée sous forme de travaux anthropologiques, linguistiques ou littéraires au domaine berbère en comparaison avec son œuvre romanesque quantitativement peu importante. Directeur du Centre de recherches anthropologiques, préhistoriques et ethnographiques (CRAPE), il consacre toute son énergie à en faire un grand centre de rayonnement scientifique connu par la grande valeur de ses publications, notamment sa revue Libyca. Faisant partie d’un peuple qui a vu défiler les invasions, Mammeri constate que “l’histoire a toujours été écrite par les vainqueurs”, c’est pourquoi il encourage les études sur la préhistoire pour mettre en valeur les liens qui rattachent l’homme d’avant, celui de la préhistoire, à l’homme d’aujourd'hui, celui de l’anthropologie socioculturelle, terme qu’il substitue à ethnologie, cette dernière étant soupçonnée de n’être que “le mythe que les tribus d’Occident bâtissent à leur usage particulier et dont nous n’étions que le prétexte (...). Les ethnologues tronqués de l’Occident nous enrobaient de rets de leur raisonnement pour nous exorciser, ramener notre étrangeté à leur raison, qui était la raison”, alors que l’anthropologie culturelle insiste, elle, sur l’aspect spécifique du développement de chaque culture en étudiant les croyances et les institutions d’un groupe conçues comme fondements des structures sociales. La quête inlassable de Mammeri était de découvrir l’homme berbère dans sa nature profonde et spécifique telle qu’elle résulte de ses origines, de son évolution historique, de sa langue et de sa culture. Une culture essentiellement orale dont le patrimoine constitue les racines de tout le Maghreb et même de la Méditerranée. L’Ahellil du Gourara et Poèmes kabyles anciens participent justement de cette grande œuvre de sauvegarde d’un héritage qui concourait à enrichir le patrimoine humain universel, telle était la ferme conviction de leur auteur. “Pourquoi nous ne serions pas, nous-mêmes, partie prenante dans cette grande fresque, de cette grande aventure de l’humanité tout entière ?” Mais mieux que quiconque, Mammeri savait qu’aspirer à l’universalité passait par l’affirmation de sa propre identité nullement dévalorisante. Mieux, il en était fier : “Quand je regarde en arrière, je n’ai nul regret (...). Je ne me dis pas : j’aurais voulu être un citoyen d’Athènes au temps de Périclés, ni un citoyen de Grenade au temps des Abencérages, ni un bourgeois de la Viennes des valses. Je suis né dans un carton écarté de haute montagne, d’une vieille race qui depuis des millénaires n’a cessé d’être là, avec les uns, avec les autres... (...) qui a contribué dans l’histoire de diverses façons à rendre plus humaine la vie des hommes (...) Hannibal a conçu sa stratégie en punique, c’est en latin qu’Augustin a dit la cité de Dieu, en arabe qu’Ibn Kheldoun a exposé les lois des révolutions des hommes.”
Azwaw Aït Y.
Le Jeune Indépendant 1er Mars 2005 Seizième anniversaire de la disparition de Mouloud Mammeri Quelle suite accordée à son combat ? par T. Drifa
Seize ans sont déjà écoulés depuis la disparition tragique d’un des piliers de la littérature algérienne et maghrébine. Le 25 février 1989 est une date qui restera à jamais gravée dans les mémoires. Le souvenir n’est pas beau puisque février de cette année-là a emporté avec lui un écrivain, un chercheur, un dramaturge, un romancier et un anthropologue, qui a laissé un énorme vide sur la scène littéraire algérienne. Mouloud Mammeri s’est éteint un certain samedi 25 février à Aïn Defla, à son retour du Maroc où il avait pris part à un colloque sur la culture maghrébine. Les derniers adieux lui ont été faits le 28 du même mois dans son village natal Thaourirth Mimoun à Ath Yanni. L’homme qui était très proche de la communauté universitaire devait se reposer tranquillement dans sa dernière demeure. Une génération montante promettait de préserver son œuvre et de poursuivre ses recherches, notamment dans le domaine de la culture et de la langue amazigh. Mais depuis, les choses ont beaucoup changé. On continue à ressusciter sa mémoire, à parler de son travail et à organiser des conférences sur sa vie, en termes de reconnaissance. Malheureusement, les hommages n’ont pas été accompagnés du travail promis. Les recherches entamées par Mouloud Mammeri dans le domaine de la culture amazigh n’ont pu avoir une suite favorable. Les rangs se sont dispersés juste après la mort du grand maître. Les élèves formés par lui à l’université d’Alger ne sont plus sur la même longueur d’onde. Les différents courants qui sont apparus ont apporté un coup fatal à la culture amazigh et chacun voulait donner aux recherches de Mammeri la dimension qui le servait le mieux. Pourtant, l’anthropologue dans son travail d’investigation sur la vie des peuples amazighs et leurs dialectes voulait maintenir cette variété culturelle et l’exploiter pour le bien de la communauté berbère tout en évitant les déchirures. Le chercheur avait beaucoup voyagé dans les pays du Maghreb pour mieux connaître la communauté berbère dans toute sa variété linguistique. Ce n’est qu’après cette étape qu’il a élaboré le dictionnaire de langue amazigh, dont il réunit tous les dialectes. C’était une façon d’éviter la disparition de la langue et de réunir tous les peuples amazighs sous le même chapeau. C’est à partir de là aussi que Mouloud Mammeri a créé la nouvelle transcription et ses règles. Une transcription latine mais qui ne faisait pas de différence entre Kabyles, Chaouis, Chenouis, Mezabs et Chelhis. Tous les Berbères ont été pris à même titre d’égalité. Aujourd’hui, et par malheur, l’œuvre de l’homme est détournée de sa propre vocation. On assiste malheureusement à des discours dans lesquels on qualifie Mouloud Mammeri de «régionaliste» qui voulait exploiter les autres dialectes de langue amazigh uniquement pour renforcer le kabyle. Pour ces gens partisans d’une aile qui veut que la Kabylie soit «autonome», tout le travail du chercheur est allé dans ce sens. L’auteur de la Colline oubliée, la Traversée, le Sommeil du juste, les Poèmes de Si Muhend u M’hend, Macahu Telemcahu et de la Recherche sur la société berbère n’aurait jamais accepté une telle approche. Ce sont pourtant des gens à qui il a transmis ses méthodes et ses connaissances pour que le travail ne s’arrête pas un jour. Mouloud Mammeri était convaincu que tamazight serait enseignée un jour à l’école algérienne, et c’est pour ce jour-là qu’il se préparait. Il voulait que tous les Algériens l’apprennent avec la même transcription et les mêmes règles sans distinction aucune. Aujourd’hui, quand l’objectif est atteint, le travail est abandonné et le combat de Mammeri risque d’être transformé en «un combat autonomiste». Y aura-t-il alors des voix qui rendront à l’enfant de Thaourirth Mimoun l’hommage qu’il méritait et éviteront à son travail d’être mis aux oubliettes ou détourné de sa vraie vocation ? L’homme, qui est d’une renommée mondiale, risque l’oubli dans son propre pays.
T. D.
Info Soir 27 février 2005 Mouloud Mammeri 16 ans déjà
Il y a 16 ans, Mouloud Mammeri trouvait la mort dans un accident de la circulation, dans la nuit du 25 au 26 février 1989. Mammeri a vu le jour le 20 décembre 1917 au village de Taourirt Mimoun, sur les hauteurs des Ath Yenni, dans la wilaya de Tizi Ouzou. L’écrivain en sciences humaines a légué à la postérité des œuvres fécondes et immortelles, ayant marqué d’une empreinte indélébile la culture algérienne. Ses romans, tels que La colline oubliée, L’Opium et le bâton, Le sommeil du juste et La traversée ont été traduits en plusieurs langues. Les deux premiers ont été adaptés à l’écran respectivement par Abderrahmane Bouguermouh et Ahmed Rachedi. C’est à cet éminent linguiste qu’on doit également les Isefra, recueil de poèmes épiques du troubadour Si Muh U M’hand ; c’est lui également qui a élaboré la grammaire amazighe, Tadjarumth n’tmazighth, ainsi que le recueil des contes anciens Machahou, Talamchahou. Le dramaturge Mammeri s’est distingué par sa trilogie théâtrale formée des pièces Foehn, Le banquet et La mort des Aztèques. Il s’est livré, par ailleurs, à des recherches anthropologiques, historiques et ethnographiques.
APS Liberté 27 février 2005 Hommage à Mammeri Da l’Mulud ou la quête identitaire Par Nassira Belloula
Dès la parution, en 1952, de son premier roman, La colline oubliée, récompensé par le prix des Quatre jurés, une critique violemment hostile, émanant de militants nationalistes, accueillait le livre. Cette attitude dénotait le poids des préjugés de ces nationalistes, qui ont accueilli dans la négation et l’intolérance, notamment le premier livre d’Assia Djebar, ainsi que celui de Mouloud Feraoun.
Plusieurs de ces auteurs, notamment Kateb Yacine ou Mohamed Dib, devenus aujourd’hui des classiques de la littérature algérienne et des écrivains universels, ont partagé la même destinée, faite de brimade, d’expropriation identitaire, d’exil, de privation et d’indifférence. L’attitude des nationalistes qui, dès 1954, criaient à la “traîtrise”, au “régionalisme” ou encore à “l’assimilation” allaient justement augurer d’une conduite assez atypique de nos gouvernés. Mouloud Mammeri a toujours incarné l’homme tranquille, serein, un sage aussi tant par son travail minutieux et assidu que par sa force de caractère. Mouloud Mammeri initié à la littérature grecque et latine est arrivé à l’écriture après un long cheminement, bien qu’il n’envisageait pas une carrière de romancier. Il disait à ce propos : “Je ne me vois pas fabriquer des romans à la chaîne.” D’où, sans doute, une œuvre littéraire qualitativement importante, quatre romans, deux pièces de théâtre, deux recueils de contes pour enfants, en trente-quatre ans. Cela s’explique aussi par la vision réaliste qu’il avait de son métier de romancier, lui qui, réfutant la littérature de commande, disait : “Je me refuse à être l’esclave de l’événement. Je ne me résous à écrire réellement que lorsque j'ai quelque chose à dire (…)” et d’ajouter un peu plus loin : “Il faut aller à l'essentiel du destin des hommes, sans nécessairement fuir les drames quotidiens qui en constituent l’essentiel des évènements.” Et ses quatre œuvres majeures marquent chacune une période cruciale de l’histoire de l’Algérie : avec La colline oubliée, l’enfance et l’adolescence sur fond de colonisation, Le sommeil du juste, les prémices de la guerre, L’opium et le bâton, la guerre de libération (portée à l’écran en 1974), puis La traversée, écrite dix-sept ans après sa trilogie, l’Après-indépendance. Mouloud Mammeri a été également à la tête de l’Union des écrivains algériens, fondée en 1963, et il revient, en 1989, sur les raisons de son départ de cette union, en déclarant dans Horizons du 23 janvier 1989 : “Le jour où on est venu nous signifier que nous étions une organisation de masse, j’ai quitté l’Union […] Comment peut-on enfermer, comme des moutons dans un parc, des hommes et des femmes qui ont chacun un visage, un nom, un cœur ?” Mouloud Mammeri, à travers la thématique d’une quête savante de l’identité et d’un déchirement entre deux univers, souhaitait rétablir l’amazighité dans l’espace culturel national. Cet immense engagement était perceptible dans le cheminement logique de son parcours, vu que, dès 1974, suite aux Isefra de Si Mohand u M'hand (Maspéro, 1969), auxquels il fallait une base transcriptive, Mammeri élabore La grammaire kabyle, entièrement rédigée en berbère pour, ensuite, être traduite en langue française. Attaché au passé et aux profondes valeurs ancestrales et universelles, par son souci d’être utile aux mœurs, il entreprendra, par la suite, d’autres travaux à caractère anthropologique et linguistique dans le cadre de son travail dans le Centre de recherches anthropologiques, préhistoriques et ethnographiques (Crape) à Alger, qu’il a dirigé entre 1969 et 1979. Frappé par les similitudes et la parenté entre les cultures kabyle, mozabite et chaouie des Aurès, Mouloud Mammeri va tenter de retrouver les origines spécifiques des populations des ksour du Gourara, en se forçant de recueillir et de reconstituer, durant huit ans, en parcourant les régions du Gourara, visitant ksour et foggaras et arrivant jusqu’au cœur de l’erg occidental, un précieux document sur cette culture ancestrale en perdition en recueillant témoignages, contes et, surtout, cette poésie transmise oralement. Le nom de Mouloud Mammeri reste aussi étroitement lié au Printemps berbère. Pour rappel, il a suffi d’une interdiction, en avril 1980, de la tenue d’une conférence sur la culture amazigh par Mammeri pour provoquer justement le Printemps berbère.
BIOGRAPHIE - 1917 : naissance de Mouloud Mammeri - 1938 : publication d’une série d’articles sur la société berbère dans la revue marocaine Aguedal. - 1940 : démobilisation du front de la Seconde Guerre mondiale. Il poursuit ses études entamées au Maroc au lycée Louis-Gouraud à l’ex-lycée Bugeaud (Émir-Abdelkader) et prépare l’École normale supérieure. - 1947 : enseignant à Médéa, puis à Ben Aknoun (Alger), après avoir réussi le professorat de lettres. - 1952 : publication de La colline oubliée chez Plon - 1953 : prix des Quatre jurés - 1955 : publication du Sommeil du juste (Plon). - 1957 : ciblé par l’armée coloniale, il se réfugie au Maroc. - 1965 : L’opium et le bâton (Sned) - 1969-1980 : il dirige le Centre national de recherches anthropologiques, préhistoriques et ethnologiques, le Crape - 1974 : il élabore sa grammaire berbère qui sera rééditée chez Bouchène en 1992 - 1980 : parution de Poèmes kabyles anciens à l’origine du Printemps berbère de Kabylie - 1982 : il fonde à Paris le Centre d’études et de recherches amazighes, le Cedam, et crée la célèbre revue Awal - 1988 : il reçoit le titre de docteur honoris causa à l’université de la Sorbonne, à Paris. Avant sa mort accidentelle, il accorde un long entretien à Tahar Djaout sur l’écriture comme espace identitaire - 1989 : décès de Mouloud Mammeri, victime d’un accident de la circulation, de retour d’Oujda - 1991 : création du prix annuel Mouloud-Mammeri par la Fédération des associations culturelles
N. B. 16e anniversaire de la mort de mouloud mammeri La colline n’est pas oubliée
À l’occasion du 16e anniversaire de la mort de Mouloud Mammeri, plusieurs festivités commémoratives sont organisées, depuis jeudi dernier, un peu partout en Kabylie. C’est le cas notamment des associations culturelles Talwit, Tafrara, Tussna, qui ont concocté des programmes d’activités pour perpétuer le message de Mammeri à Mohend Azwaw. L’association socioculturelle Tussna de Aïn El Hammam a procédé, hier, au vernissage d’une exposition de son fonds documentaire à la maison de la culture Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou. À Aït Oumalou, la dynamique association Tafrara a tenu à commémorer, comme il se doit, l’anniversaire de la mort de da l’mulud. Outre une exposition qui retrace la vie et l’œuvre de Mammeri, des conférences et autres récitals poétiques ont rythmé, un week-end durant, le programme de l’association, dont les membres n’ont pas manqué d’organiser le traditionnel pèlerinage au village Taourirt Mimoun pour le dépôt de gerbes de fleurs sur la tombe de Mouloud Mammeri, vendredi dernier. Pour sa part, l’association culturelle Talwit de Beni Yenni a organisé, depuis samedi, tout un programme d’activités commémoratives. L’ouverture s’est faite, hier, à l’espace culturel Mouloud-Mammeri, au village Taourirt Mimoun, chef-lieu de commune. Au menu de ce programme, qui a drainé un public nombreux, des conférences, des projections vidéo, des expositions et autres animations culturelles. Les trois jours d’activités seront mis à profit pour l’ouverture de la médiathèque municipale par les organisateurs. Le traditionnel recueillement aura lieu demain lundi au cimetière du village, suivi d’un dépôt de gerbes de fleurs. Ce bouillon de culture nous rappelle que la culture, pour paraphraser Mammeri, c’est ce qui nous reste après avoir tout perdu. C’est sans doute pour cette raison que des bourgeons d’espoir dans les villages isolés se donnent la peine de perpétuer l’œuvre de Da l’Mulud. Par des gestes simples qui montrent que la colline n’est pas oubliée et que celui qui repose en paix dans son sommeil du juste restera lui aussi inoubliable.
B. T. L'Expression 28 février 2005 Il y a 16 ans, une lumière s’éteignait
Dans un petit coin du cimetière d’Aman Imarghanen, au lieudit Abri Bouzal, repose un géant.
L’homme était grand et la mort en a fait un géant ! Mouloud Mammeri, que tout le monde aime à appeler Dda l’Mouloud, est mort des suites d’un malheureux accident de la route aux environs d’Aïn Defla alors qu’il revenait du Maroc en ce 27 février 1989. La nouvelle, qui s’est répandue telle une traînée de poudre en Kabylie d’abord et en Algérie ensuite, a pris de court un peu tout le monde et notamment, ces dizaines de milliers de jeunes pour qui il est le phare dans le brouillard. Dda l’Mouloud est mort ! La nouvelle dure et terrible a surpris plus d’un! On le pensait tel un vieux chêne solidement enraciné sur l’humus amazigh, comme quasi éternel. C’est qu’il avait encore tant à faire et tamazight et la culture avaient tellement besoin de lui. Mais la force puissante du sort en avait décidé autrement. Ce 27 février, Tizi Ouzou pleurait et se tordait de douleur. Les étudiants et les animateurs du MCB originel ne savaient plus quoi dire ni que faire ! Le père, l’Amusnaw, le sage d’entre les sages, et l’homme attentif aux autres n’est plus. De toutes les régions de Kabylie et aussi de tous les coins d’Algérie, des convois d’hommes, de , d’adolescents ont tenu à rendre l’ultime hommage à un géant. Le lendemain, lors de son enterrement, la foule était immense ! De mémoire des gens de Beni Yenni, jamais il n’y eut autant de visiteurs. Tout le monde voulait le voir, et chacun voulait lui rendre hommage. Jusqu’à ses détracteurs de la veille, ceux-là qui, du haut des tribunes, vilipendaient de façon abjecte les travaux de l’homme, qui ont tenu à faire le déplacement de Beni Yenni. Ceux-là s’étaient d’ailleurs faits tout petits ce jour-là, ils avaient peur de la vindicte populaire. Un ministre de la République, aujourd’hui disparu, et se piquant de culturalisme, lui qui en fait n’était qu’un simple concentré de slogans et autres «prêt à penser», a difficilement évité les jets de pierres des jeunes gens. Heureusement pour lui, les gens de Beni Yenni étaient intervenus pour lui éviter les blessures, mais il était reparti de là conscient de son détachement du peuple! La presse n’était pas tellement représentée à l’enterrement ; il est vrai qu’à cette époque, seule la Pravda nationale était sur les étals des kiosques. Cette Pravda qui, un jour d’avril 1980, avait fait un mauvais procès à l’homme et l’avait désigné pratiquement à la vindicte populaire. Fort heureusement, le peuple savait faire la différence entre les propos des spécialistes de l’insulte et de la calomnie et le legs d’un homme de culture. Dda l’Mouloud était un écrivain fécond et aussi un enseignant de valeur pour finir comme chercheur. Sa vie, il l’avait vouée à un seul idéal : servir réellement son pays. Déjà, lors de la guerre de Libération nationale et dans le secret que demandait l’époque, il rédigeait, à la demande de feu M’hamed Yazid, les dossiers dont se servait l’Algérie en lutte, dans les assises internationales. Mais les tenants de la vindicte et la pensée unique ont longtemps prétendu le contraire. Ces révolutionnaires de la 25e heure ont cru faire oeuvre utile en essayant d’effacer de la mémoire du peuple cet homme et ce faisant, ils l’avaient chargé des maux qui, en fait, pouvaient être les leurs ! Enseignant, il s’est vu refuser la chaire de berbère à l’université d’Alger ! Cette chaire où il avait éveillé tant et tant de consciences à la culture originelle. Homme de lettres, il a vécu l’ostracisme et le rejet quand, au printemps 1980, et sur ordre du wali de l’époque, sa conférence sur les poètes kabyles anciens fut interdite à Tizi Ouzou. Dda l’Mouloud a fait la traversée après nous avoir raconté la mort absurde des Aztèques dans le banquet et s’en est allé se reposer du sommeil du juste dans un petit coin de la colline oubliée, il n’avait cure ni de l’opium ni du bâton, il savait depuis Ameur des arcades que ce qui importe c’est de laisser derrière soi, après le départ des Isefras de Si Mohand ou encore Cheikh Mohand a dit ! Son nom brille dans le firmament de la culture universelle alors que ses détracteurs sont tombés dans l’oubli. Belle revanche de l’histoire ! Aujourd’hui, la tombe du cimetière d’Aman Imarghanen n’arrête pas de recevoir les foules de visiteurs les uns pour un moment de recueillement et les autres pour y déposer une fleur. Dda l’Mouloud repose en paix, tu as fait ta part et la meilleure, nul ne t’oubliera et tamazight en particulier!
A. SAÏD La Nouvelle République 28 février 2005 Il y a 16 ans décédait accidentellement Mouloud Mammeri L’héritage de l’Amusnaw toujours vivant
Ayant vu le jour le 28 décembre 1917 à Taourirt Mimoun, petit bourg perché sur les monts de la grande Kabylie, Mouloud Mammeri mènera une existence plus ou moins nantie, comparée à celle de ses petits camarades, du fait du rang social de son père qui était l’amin (maire) du village. D’ailleurs, c’est une des raisons qui feront que l’enfant grandira au contact des amusnaw (sages) de sa localité, puisant dans leur savoir et leur verbe beaucoup de sagesse et de connaissances. Mammeri dira un jour à ce sujet : «Mon père a été l’avant-dernier dans la lignée de la tamusni. Il a eu un disciple, Sidi Louenas, qui est mort aussi. Et après eux, c’est quelque chose d’autre qui commençait : ceci est reconnu par tout le groupe, ce n’est pas une vision personnelle. Moi-même, je ne pouvais pas être le successeur de mon père, j’étais à l’université, j’avais donc déjà d’autres points de référence. Mais il n’en reste pas moins qu’il a eu toute sa vie le souci de m’initier le plus qu’il pouvait. Je suis même en train de me demander si ce goût que j’ai très tôt pour la littérature, ne m’est pas venu de cette ambiance, dans laquelle je baignais sans même y penser, étant enfant.» Après des études primaires, moyennes et secondaires effectuées au village, au Maroc puis à Alger, Mouloud Mammeri partira étudier à Paris où il décrochera avec brio le concours de professorat de lettres classiques. Cette expérience lui permettra de «rencontrer, par la médiation de la langue française, un monde qui le choque d’abord car il lui est linguistiquement et culturellement étranger, le séduit ensuite (…)» Et d’ajouter : «Lorsque j’étais encore enfant, mon père m’emmenait systématiquement dans les marchés parce que les marchés sont un lieu de rencontres privilégié. Le marché de mon père durait une demi-heure et tout le reste du temps, il le consacrait à rencontrer des gens et rester avec eux ; eux en faisaient autant. Il y avait une espèce de formation sur le tas, à la fois consciente et diffuse. C’était un apprentissage par la praxis. Ce n’était pas un apprentissage abstrait. Il fallait aussi agir conformément à un certain nombre de préceptes, de valeurs, sans quoi la tamusni n’est rien. La tamusni est un art et un art de vivre, c’est-à-dire une pratique qui a des fonctions pratiques. Les productions qu’elle permet : poèmes, sentences ne sont pas de l’art pour l’art même si leur forme très recherchée peut le faire croire.» Plus tard, il se verra contraint de quitter le pays et tout cet espace de connaissances et d’échanges, pour échapper à la répression coloniale. Il ira vivre au Maroc et sera, tour à tour, professeur de l’enseignement secondaire et supérieur, directeur du Centre de recherches anthropologiques, préhistoriques et ethnologiques du Musée du Bardo, à Alger, premier président de l’UEA. Décédé accidentellement, le 25 février 1989, alors qu’il revenait d’une conférence au Maroc, Mouloud Mammeri laissera une œuvre pas très prolixe comparée à celles d’autres écrivains de sa génération, mais très élaborée dans le fond puisqu’il s’attellera sa vie durant à œuvrer pour la pérennisation du patrimoine oral berbère. Auteur de quatre grands romans, La Colline oubliée (Plon, 1952), Le Sommeil du juste (Plon, 1955), L’Opium et le bâton (Plon, 1965) et La Traversée (Plon, 1982), Mammeri signera également, en 1973, deux pièces de théâtre (Le Banquet, précédée de La Mort absurde des Aztèques) et Le Foehn, ainsi que des recueils de nouvelles et de contes (Machaho et Telem Chaho en 1980). Mammeri publiera par ailleurs deux recueils commentés de poèmes kabyles traduits, en l’occurrence Les Isefra, poèmes de Si Mohand ou M’hand (Maspéro, 1969) et Poèmes kabyles anciens (Maspéro, 1980). Ses travaux participent à donner à sa langue et culture d’origine les moyens d’un plein développement pour qu’un jour la culture de (ses) pères vole d’elle-même, refusant qu’elle continue à être considérée comme «une culture de réserve indienne ou une activité marginale, plus tolérée qu’admise». Ancrée dans le réel, l’œuvre romanesque de Mouloud Mammeri a toujours traduit, et de façon spontanée, le vécu du peuple algérien. Il a toujours refusé d’être une plume à la solde d’une quelconque sphère politique ou appareil d’Etat, ayant toujours eu pour souci majeur de retransmettre la réalité algérienne. Chacun de ses quatre romans marque une période cruciale dans l’histoire de l’Algérie (La Colline oubliée, l’enfance et l’adolescence ; Le Sommeil du juste, les prémices de la guerre, L’Opium et le bâton, la guerre de Libération, La Traversée, l’après-Indépendance), constituant ainsi le témoignage vivant du passé colonial de l’Algérie, fourni par un auteur dont l’honnêteté littéraire fait encore de nos jours parler de lui.
Hassina A. El Watan 17 février 2005 Mouloud mammeri, souvenir d’une journée chargée de promotion Une verdure exubérante à tout jamais !
Ce jour-là, tes gestes si bien mesurés, le timbre de ta voix avaient une valeur prémonitoire. J’en ai la preuve ! Toute prémonition est débordante par essence, toutefois, il lui arrive de se fixer des limites, de dresser des garde-fous.
J’avais devant moi un de ces vieux de Kabylie qui, jadis, avaient le génie d’enfanter les mots et de les semer, en toute sagesse, au gré de leurs rencontres ! Cela eut lieu en cet après-midi du 31 janvier 1989, dans une ruelle donnant sur la place Emir, là où mon frère Ferhat Cherkit devait trouver la mort quelques années après. Mon ami Ahmed Halli, « w’lid el houma », avec qui j’échangeais, sur place, des avis sur les dernières publications littéraires algériennes, me fit part du mal qu’il trouvait à dénicher des textes au goût de la jeunesse. Si Mouloud, tu fis alors ton apparition, souriant, avec une tête qui ressemble à celle d’Apulée de Madaure pour lequel tu avais une grande considération. Assez de préambules, m’étais-je dit alors, invitant ainsi mon ami à opter carrément pour un de tes romans. La réponse de celui-ci fut celle d’un boxeur prêt à recevoir des coups tout en feignant l’esquive : parce que Si Mouloud est encore vivant ! La maison d’édition où je dirige une collection pour la jeunesse, ne prend d’engagement qu’envers les auteurs dont les écrits sont tombés dans le domaine public ! Drôle d’engagement vis-à-vis des morts ! Et le rire, le tien jaillit comme une eau limpide des sommets du Djurdjura. Une légère inclinaison vers la droite, et c’est alors qu’entre une rangée de dents éclatantes de blancheur, tu lanças, sagement, mais non sans une pointe d’ironie : je suis prêt à mourir vingt-cinq ans avant terme par amour pour la littérature et par respect pour la jeunesse de mon pays !
Vingt-six jours après
Vingt-six jours exactement après cette rencontre, vingt-cinq ans pour reprendre la valeur prémonitoire, on annonça que tu avais voyagé en direction de « ta colline oubliée ». Les chroniqueurs, s’évertuant à décrire les conditions de ce voyage, ne manquèrent pas de jeter l’anathème sur cette violente tempête qui abattit un arbre en le projetant sur ta voiture à l’entrée de la ville de Aïn Defla. Au lendemain de ces instants fatidiques, mon ami, le regretté Tahar Djaout, plongé encore dans une profonde affliction, me dit que tu revenais du Maroc où tu avais pris part à un colloque réunissant des intellectuels maghrébins. Et dire, me confia t-il encore, que Si Mouloud avait, dans son cartable, son billet aller-retour par avion ! En fait, et en toute modestie, nul ne se connaît le droit de sonder les profondeurs, d’expliquer, un tant soit peu, le comportement d’un grand poète. Car les poètes, les véritables, selon Octavio Paz, n’ont pas de biographie. Si Mouloud, je quittais donc cette ruelle en te confiant mon ami Ahmed Halli avec lequel tu avais déjà entamé une discussion sur l’historien latin Tite-Live. La mort n’a rien de beau, j’en ai déjà, personnellement, un avant-goût, non pas un arrière-goût, si je puis m’exprimer ainsi. Pourquoi donc s’étaler là-dessus ? Si je devais dire encore quelque chose sur ta probité intellectuelle, sur tes racines qui vont profondément dans la terre de tes ancêtres, je me contenterais d’un seul témoignage apporté, celui-là, par ton ami le penseur marocain Lahbabi. Au cours d’une soirée-débat sur le thème de la paix dans le monde, le professeur Lahbabi, faisant le tour de l’héritage culturel arabo-musulman, fixa le regard sur toi comme pour t’inviter à donner ton avis sur la question. Le poète, en toi, ne broncha pas. Notre penseur s’est mis alors à copier, oui, à copier tes gestes et tes silences. « C’était à Fès, dit-il, en 1959, au lendemain de la création de la défunte union des écrivains maghrébins. Allah m’est témoin, je vis les yeux de Mouloud Mammeri » larmoyer, sous l’effet de l’émotion, à l’instant même où il prit entre les mains le manuscrit original des Prolégomènes d’Ibn Khaldun ! Si Mouloud, dès les premières lignes de ton roman La Colline oubliée, la nature est, au corps à corps, avec une verdure passagère qui a tout juste le temps de barbouiller de vert les environs de ton village. Pour moi, pour tes lecteurs, ce qu’il y a de sûr, c’est que cette verdure qui tranche sur toutes les autres couleurs, restera à tout jamais !
Merzak Bagtache
La Nouvelle République 30 mars 2004 Bibliothèque Urbaine de Mohammadia : rencontre autour de l’oeuvre de Mammeri L’écrivain-témoin
La Bibliothèque urbaine de Mohammadia (Alger) a abrité, mercredi dernier, une rencontre animée par l'universitaire Mohamed-Cherif Ghebalou, enseignant à l'Université d'Alger et journaliste, autour de "Mouloud Mammeri : l'homme et l'œuvre". Même si l'assistance était restreinte, il n'en demeure pas moins que cette rencontre fut d'un intérêt certain pour les quelques présents, à leur tête le directeur de la BU, M. Mourad Benzidane, qui ont pu, grâce à l'exposé du conférencier, appréhender l'écrivain sous un autre jour. Devant essentiellement tourner autour de l'écriture de Mouloud Mammeri, la conférence animée par M. Ghebalou a, toutefois, abordé d'autres aspects inhérents à l'auteur, notamment sa vie, vecteur indissociable de la carrière littéraire de l'auteur. Ayant vu le jour le 28 décembre 1917 à Taourirt Mimoun, petit bourg perché sur les monts de la Grande Kabylie, Mouloud Mammeri mènera une existence plus ou moins nantie, comparée à celle de ses petits camarades, du fait du rang social de son père qui était l'amin (maire) du village. D'ailleurs, c'est une des raisons qui feront que l'enfant grandira au contact des amusnaw (sages) de sa localité, puisant dans leur savoir et leur verbe beaucoup de sagesse et de connaissances. Après des études primaires, moyennes et secondaires effectuées au village, au Maroc puis à Alger, Mouloud Mammeri partira étudier à Paris où il décrochera avec brio le concours de professorat de lettres classiques. Cette expérience lui permettra de " rencontrer, par la médiation de la langue française, un monde qui le choque d'abord car il lui est linguistiquement et culturellement étranger, le séduit ensuite (…)". Plus tard, pour échapper à la répression coloniale, il ira vivre au Maroc et sera, tour à tour, professeur de l'enseignement secondaire et supérieur, directeur du Centre de Recherches Anthropologiques, Préhistoriques et Ethnologiques du Musée du Bardo à Alger, premier président de l'UEA. Décédé accidentellement, le 25 février 1989 alors qu'il revenait d'une conférence au Maroc, Mouloud Mammeri laissera une œuvre pas très prolixe comparée à celles d'autres écrivains de sa génération, mais très élaborée dans le fond puisqu'il s'attellera sa vie durant à œuvrer pour la pérennisation du patrimoine oral berbère. Auteur de quatre grands romans, La Colline oubliée (Plon, 1952), Le Sommeil du juste (Plon, 1955), L'Opium et le bâton (Plon, 1965) et La Traversée (Plon, 1982), Mammeri signera également, en 1973, deux pièces de théâtre (Le Banquet, précédé La Mort absurde des Aztèques) et Le Foehn, ainsi que des recueils de nouvelles et de contes (Machaho et Telem Chaho; en 1980). Mammeri publiera aussi deux recueils commentés de poèmes kabyles traduits, en l'occurrence Les Isefra, poèmes de Si Mohand ou M'hand (Maspéro, 1969) et Poèmes kabyles anciens (Maspéro, 1980). Ses travaux participent à donner à sa langue et culture d'origine " les moyens d'un plein développement pour qu'un jour la culture de (ses) pères vole d'elle-même, refusant qu'elle continue à être considérée comme " une culture de réserve indienne ou une activité marginale, plus tolérée qu'admise". Ancrée dans le réel, l'œuvre romanesque de Mouloud Mammeri a toujours traduit, et de façon spontanée, le vécu du peuple algérien. Et le conférencier, M. Ghebalou, mettra l'accent sur ce point précis, signalant que l'écrivain a toujours refusé d'être une plume à la solde d'une quelconque sphère politique ou appareil d'Etat. " Mammeri réfutait la littérature de commande. Il disait : Je me refuse à être l'esclave de l'événement. Je ne me résous à écrire réellement que lorsque j'ai quelque chose à dire (…) "et d'ajouter un peu plus loin : "Il faut aller à l'essentiel du destin des hommes, sans nécessairement fuir les drames quotidiens qui en constituent l'essentiel des événements ". Ayant toujours eu pour souci majeur de retransmettre la réalité algérienne, Mammeri a, cependant, toujours refusé de le faire sous la pression. Et c'est justement " cette intrusion dans l'espace littéraire de l'auteur qui nous fait découvrir toute sa sensibilité ", une sensibilité basée avant tout sur la sincérité et la liberté de dire. Pour le conférencier, il est important de saisir l'œuvre de Mouloud Mammeri dans son "acception nationale" car l'écrivain a exprimé " le chant profond de l'Algérie dans une optique qui relie l'attachement à la tradition orale et cette extraordinaire ouverture vers l'universalité". Concernant son œuvre romanesque, M. Ghebalou dira que chacun de ses quatre romans marque une période cruciale dans l'histoire de l'Algérie (La colline oubliée, l'enfance et l'adolescence, Le Sommeil du juste, les prémisses de la guerre, L'Opium et le bâton, la guerre de libération, La Traversée, l'après-indépendance), constituant ainsi le témoignage vivant du passé colonial de l'Algérie, fourni par un auteur dont l'honnêteté littéraire fait encore de nos jours parler de lui.
29-03-2004 Hassina A.
Middle East Magazine - février 1984 le rôle du romancier... Chris Kutschera
Q: Votre dernier livre, l’Opium et le Bâton, date de 1965, sauf erreur. La “Traversée”, de l’année dernière. Ce qui fait dix-sept ans de silence. Pourquoi ce long, long silence?
Mouloud Mammeri: ... Je pense personnellement que c’est en grande partie dû à l’histoire, non seulement la mienne, personnelle, mais l’histoire algérienne, parce que comme mes romans épousent la réalité algérienne, en gros en tout cas, et l’épousent comme ça dans le temps, j’avoue que pendant cette période... Cette période a été tellement traumatisante, tellement essentielle, qu’à mon avis il n’y avait que deux façons de la traiter ou de s’en servir: Ou bien comme un chroniqueur, le travail d’un journaliste qui raconte au jour le jour les évènements tels qu’ils se passent, et qui éventuellement les interprète, ce qui n’est pas du tout mon rôle, ni ma compétence...
Deuxièmement, justement, peut-être, celle que j’ai choisie, la voie que j’ai choisie, le roman, mais alors là, c’est tout à fait différent; à mon avis vous n’êtes pas du tout assujetti à l’actualité; mais surtout je crois que le point de vue du romancier est différent de celui du chroniqueur parce qu’il lui faut à lui une certaine distance par rapport à l’évènement, il lui faut une certaine distance, il ne peut pas coller à l’évènement, exactement. À mon avis les faits tels qu’ils se déroulent, en tout cas pour moi,je ne sais pas si c’est comme ça pour les autres, mais c’est comme ça que ça se passe pour moi, à mon avis les évènements ont besoin d’une espèce de décantation, d’une espèce d’intériorisation, à l’intérieur de moi-même, pour qu’ils prennent une autre valeur, une autre dimension, qui puisse devenir réellement romanesque. Je crois que le roman, si vous voulez, en mentant, puisqu’on invente une histoire qui n’existe pas, qui n’est pas vraie, en mentant, à mon avis, va au fond d’un certain nombre de choses, va un peu plus vers l’essentiel, puisqu’on invente. Un romancier est obligé d’inventer; c’est son métier, d’accord, mais il invente toujours dans le sens d’une vérité à mon sens plis profonde. Enfin on ne peut pas mentir n’importe comment. Alors, à cela s’ajoute que sur le plan personnel, bien sûr, la simple adaptation de l’ancien mode de vie de l’Algérien moyen comme moi à l’indépendance, avec tout ce que cela suppose... avec les évènements qui se sont passés dans l’intervalle... suppose quand même une certaine... suppose qu’on est accaparé au jour le jour, et là vraiment je n’ai pas eu le temps: il a fallu que je me réadapte à un mode d’existence différent, nouveau, oui, alors je pense que c’est comme cela que cela s’explique. Je m’excuse, c’est une simple parenthèse, mais pendant ces 17 ans, je n’ai pas fait paraître de roman, mais j’ai écrit quand même des choses qui ne sont pas encore parues, que j’ai gardées en manuscrit... et j’ai publié des études sur la poésie berbère.
Q: Si l’on en juge d’après la lecture de la “Traversée”, vous ne semblez pas très heureux, très épanoui, dix-sept ans après l’indépendance. Ce livre est assez amer. Est-ce que vous revendiquez cette amertume?
M.M: oui, je la revendique entièrement. Bon, maintenant encore faut-il en donner les raisons. Je pense que le travail, la fonction, la vocation, je n’aime pas trop ces mots-là, enfin bon, disons simplement l’œuvre d’un romancier ne peut pas être vraie si elle n’est pas, qu’elle le veuille ou pas, contestataire de tout ce qui nie l’Homme. Mes points de référence n’étant pas politiques, il est normal, à mon avis en tout cas, qu’un romancier défende les valeurs les plus hautes, même si elles ne sont pas immédiatement réalisables. Peut-être que l’homme politique est obligé de tenir compte de je ne sais pas quoi, de la réalité de l’environnement économique, humain, sociologique; mais moi je ne suis pas un homme politique. Et en tant que romancier, ce qui m’intéresse surtout, c’est le destin de l’homme, sa liberté, sa pleine expansion; et dès que cette liberté n’est pas acquise, dès que cette plénitude n’est pas acquise, j’ai la conviction qu’il manque quelque chose, et que mon rôle c’est justement de crier que quelque chose manque à cette plénitude. Sans cela, qui remplirait cette fonction? Cela peut être celle d’un intellectuel, d’une façon générale, je suis d’accord, mais je trouve que le roman est un excellent moyen pour cela. En effet, j’assume entièrement cette amertume, comme vous dites, mais connaissez-vous cette formule: “Que la République était belle sous l’Empire”... C’est toujours comme ça. Les gens qui ont fait cette révolution, qui y ont participé, avaient naturellement des images belles du futur, que les évènements réels, que la réalité ne peuvent pas confirmer. C’était presque couru d’avance, si vous voulez. Mais encore fallait-il que quelqu’un le dise... Eh mon Dieu comme je n’avais plus rien à attendre, comme j’avais un certain âge, il a fallu que ce soit moi qui le dise, et voilà...
Q: On peut d’ailleurs se demander s’il y a eu révolution?
M.M: Là, le problème est tellement vaste que ça n’est pas la peine d’entrer dedans. Donc ceux qui ont fait la guerre de libération, qu’ils le veuillent ou non, avaient au départ un tempérament qui les prédisposait à ça; non seulement il y avait une idéologie, bien sûr, il y avait le fait qu’ils voulaient un certain ordre, se débarrasser d’un ordre et en instaurer un autre; mais en dehors de l’idéologie, une fois que vous entrez dans la pratique quotidienne de cette guerre de libération, il faut un certain tempérament... Et la guerre était longue, à mon avis trop longue, sept ans et demi, c’est beaucoup pour une guerre de libération qui a été aussi dure. On finit au bout d’un temps si long par utiliser beaucoup de vertu, qualités, qui sont très efficaces pour la lutte, effectivement; mais quand la paix revient, vraiment, ça devient des handicaps extraordinaires. Enfin, celui qui a été héros pendant sept ans est tout à fait désemparé quand il revient, parce qu’il ne sait que faire de son héroïsme, il ne sert plus à rien. Même si la formule vous parait un peu comme ça.... on ne peut pas dire ça ne sert plus à rien, bien sûr, mais vraiment, il est désemparé, il ne sait plus comment... Pour faire vivre un Etat dans sa routine quotidienne, pour résoudre les petits problèmes, vous n’avez pas besoin de ces mêmes qualités que pour tenir le maquis pendant je ne sais combien d’années, avec tout ce que cela implique de courage, physique et mental, c’est tout à fait différent. En tout cas ici c’est assez frappant... Mais je crois que c’est partout comme ça.....
"Quand je regarde en arrière"
Quand je regarde en arrière, je n'ai nul regret, je n'aurai pas voulu vivre autrement ...De toutes façons, un fantasme n'est jamais que cela. Je ne me dis pas :J'aurais voulu être un citoyen d'Athènes au temps de Périclès, ni un citoyen de Grenade sous les Abencérages, ni un bourgeois de la Vienne des valses. Je suis né dans un canton écarté de haute montagne, d'une vieille race qui, depuis des millénaires n'a pas cessé d'être là, avec les uns, avec les autres...qui, sous le soleil ou la neige, à travers les sables garamantes ou les vieilles cités du Tell, a déroulé sa saga, ses épreuves et ses fastes, qui a contribué dans l'histoire, de diverses façons, à rendre plus humaine la vie des hommes.
Les tenants d'un chauvinisme souffreteux peuvent aller déplorant la trop grande ouverture de l'éventail : Hannibal a conçu sa stratégie en punique ; c'est en latin qu'Augustin a dit la cité de Dieu, en arabe qu'Ibn Khaldoun a exposé les lois des révolutions des hommes. Personnellement, il me plait de constater dès le début de l'histoire cette ample faculté d'accueil. Car il se peut que les ghettos sécurisent, mais qu'ils stérilisent c'est sûr.
C'est par là que je voudrais finir. Ceux qui, pour quitter la scène, attendent toujours d'avoir récité la dernière réplique à mon avis se trompent : il n'y a jamais de dernière réplique - ou alors chaque réplique est la dernière - on peut arrêter la noria à peu près à n'importe quel godet, le bal à n'importe quelle figure de la danse. Le nombre de jours qu'il me reste à vivre, Dieu seul le sait. Mais quelque soit le point de la course où le terme m'atteindra, je partirai avec la certitude chevillée que quelque soient les obstacles que l'histoire lui apportera, c'est dans le sens de sa libération que mon peuple - et avec lui les autres - ira. L'ignorance, les préjugés, l'inculture peuvent un instant entraver ce libre mouvement, mais il est sûr que le jour inévitablement viendra où l'on distinguera la vérité de ses faux semblants .
Tout le reste est littérature.
Mouloud Mammeri
L'Expression 29 février 2004 IL Y A QUINZE ANS MOULOUD MAMMERI Le «chêne» et son oeuvre revisités
C’est Dans un accident de voiture à Aïn Defla, que le grand écrivain trouvera la mort dans la nuit du 25 au 26 février 1989.
Il y a quinze ans disparaissait à jamais Mouloud Mammeri, écrivain de renommée mondiale et chercheur d’une rare clairvoyance. A cet effet, un hommage lui a été rendu, hier, à son village natal Taourirt Mimoun (Aït Yenni) par les associations Asafu et Talwit. En parallèle, l’association Issegh de Souama a commémoré la disparition de ce monument de l’identité berbère à la Maison de la culture qui porte son nom. Né le 28 décembre 1917 à Taourirt Moussa, Mouloud Mammeri passera une partie de son enfance à Casablanca (Maroc) avant d’atterrir à Alger pour les études secondaires. Très jeune, il se découvre une passion pour l’écriture et une grande volonté à réhabiliter la culture de l’Algérie millénaire. Son père, un amusnaw (érudit) du terroir, l’initie au savoir local. En 1952, il publie son premier roman La colline oubliée, qui constitue avec Nedjma de Kateb Yacine et Le fils du pauvre de Mouloud Feraoun, les trois grands classiques de la littérature algérienne d’expression française. Deux ans plus tard, en pleine guerre d’Algérie, il publie Le sommeil du juste. Plume engagée, Mouloud Mammeri rédigera le discours lu par feu Mohamed Yazid à l’assemblée de l’ONU. A l’indépendance, il présidera l’Union des écrivains algériens, poste qu’il laissera vacant plus tard en raison de profondes divergences avec les régents de l’époque. L’année 1965, sera celle où l’écrivain, déjà célèbre, publiera son oeuvre-phare L’opium et le bâton qui sera porté à l’écran par Ahmed Rachedi. Nommé directeur du Crape, Mouloud Mammeri versera longtemps dans les recherches anthropologiques, ethniques et linguistiques. Il rangera longtemps sa plume, exactement jusqu’en 1982, année où sera édité aux éditions Plon à Paris La traversée qui sera d’ailleurs son dernier roman. En cette même année, il fonde à Paris le Centre d’études et de recherches amazighes (Ceram) et la revue Awal. Après avoir développé un immense éventail de recherches, Mouloud Mammeri disparaîtra le 25 février 1989 dans un mystérieux accident de la circulation à Aïn Defla, alors qu’il revenait d’un colloque à Oujda (Maroc). Depuis, le «chêne» dort du sommeil du juste à Aït Yenni.
S. AREZKI El Moudjahid 28 février 2004 Commémoration de la mort de Mouloud Mammeri Il y a quinze ans, commençait le «sommeil du juste»
Il y a 15 ans, s’est éteint à l’âge de 71 ans l’homme de lettres et penseur émérite, Mouloud Mammeri, dans un accident de la circulation survenu dans la nuit du 25 au 26 février 1989 sur la route de Aïn-Defla menant vers Alger alors qu’il revenait du Maroc où il avait participé à un colloque international sur les langues maternelles. Pour marquer cette date, des hommages lui sont rendus par des associations culturelles à la Maison de la culture de Tizi-Ouzou et en son village natal où il repose du “sommeil du juste”. Mouloud Mammeri a vu le jour le 20 décembre 1917 au village Taourirt Mimoun, sur les hauteurs des Ath-Yenni, dans la wilaya de Tizi-Ouzou. L’écrivain et chercheur en sciences humaines a légué à la postérité des œuvres fécondes et immortelles ayant marqué d’un sceau indélébile la littérature algérienne. Ses romans, La Colline oubliée, l’Opium et le Bâton, Le Sommeil du juste, et La Traversée du désert ont été traduits en plusieurs langues. Les deux premiers ont été également adaptés au cinéma respectivement, par Abderrahmane Bouguermouh et Ahmed Rachedi. C’est à cet éminent linguiste qu’on doit également le recueil de poèmes berbères Les Isfra de Si Muh U M’hand. Ses recherches en langue amazigh ont été couronnées par l’élaboration de la grammaire amazighe, Tajarrumt N’tmazighth, et un recueil de contes anciens, Machahou, Talamchahou. Le dramaturge Mammeri s’est distingué par sa trilogie théâtrale formée des pièces du Fœhn, Le banquet et La mort des aztèques. Son cursus scolaire, il l’entama en son village natal de Taourit Mimoun, ou la Colline oubliée, jusqu’à l’âge de onze ans, avant d’aller au Maroc chez son oncle. Quatre ans après, il rentre au pays et s’inscrit à l’ex-Lycée Bugeaud d’Alger, actuel Emir Abdelkader, avant de s’installer à Paris où il prépara l’Ecole normale supérieure au Lycée Louis Le Grand. Il fut mobilisé dès le déclenchement de la Seconde guerre mondiale. Libéré en 1940, il s’inscrit à la Faculté des lettres d’Alger. Remobilisé en 1942, il participa aux campagnes d’Italie, de France et d’Allemagne. Après quoi, Mammeri prit part, à Paris, à un concours pour le recrutement de professeurs de lettres, avant de rentrer au pays natal en 1947. Après avoir enseigné à Médéa en 1947 et 1948, puis à Alger, il devint professeur à l’Université d’Alger où il occupa la première chaire berbère de l’Algérie indépendante, avant d’être directeur du Centre de recherches anthropologiques, préhistoriques et ethnologiques (Crape, ex-musée du Bardo) jusqu’en 1980. “Quel que soit le point de la course où le terme m’atteindra, je sais avec une certitude chevillée que, quels que soient les obstacles que l’histoire portera sur sa route, dans quel sens mon peuple (tous les peuples) ira”, tels ont été ses derniers propos qu’il tint, en 1987, à son inséparable ami, l’écrivain défunt Tahar Djaout. Liberté 26 février 2004 Il y a 15 ans disparaissait Mouloud Mammeri Une pensée pour le sommeil du juste Par Djamel Belayachi
Mouloud Mammeri était un intellectuel entier, un esprit profond formé par des disciplines littéraires, linguistiques, anthropologiques qui ont donné à son œuvre une dimension multiforme, impressionnante. Quant à sa vie, elle a traversé les pages les plus douloureuses de notre histoire. Mouloud Mammeri est venu au monde le 28 mars 1917, quand celui-ci était plongé dans le chaos da sa première grande guerre, dans le petit hameau de Taourirt-Mimoun, en Grande Kabylie. Il en est parti le 25 février 1989, quelques mois à peine après le soulèvement populaire d’octobre 1988. De par son œuvre, Mouloud Mammeri a occupé une place incontournable dans la littérature algérienne post-indépendante. Et ses recherches ont constitué, pour la génération post-1980, le socle intellectuel pour la revendication de l’identité berbère. Ses romans évoquent l’évolution de l’Algérie à travers ses guerres et ses déchirements, notamment dans la trilogie : La Colline oubliée (1952), l'Opium et le Bâton (1965), Le sommeil du juste (1983). Son œuvre littéraire, et particulièrement son avant-dernier roman, la Traversée (1982), est justement traversée d’une amertume presque insoutenable. Parce que “l’œuvre d’un romancier ne peut pas être vraie si elle n’est pas, qu’elle le veuille ou pas, contestataire de tout ce qui nie l’Homme”. Son tempérament contestataire, mais réfléchi, était soutenu par la rigueur scientifique qui sied à son travail d’anthropologue. On le retrouve principalement dans ses écrits et ses recherches sur l’identité berbère. Il signe, ainsi, ses premiers articles dans les années 1930 sur les colonnes de la revue marocaine, Aguedal. Plusieurs années plus tard, au milieu des années 1980, il fonde la célèbre revue alternative Awal, en compagnie d’autres intellectuels algériens (Tassadit Yassine, Mahieddine Djender, Pierre Bourdieu…) et crée le Centre d’Études et de Recherches Amazighes. En 1988, il est primé du titre de Docteur Honoris Causa en France. Outre ses romans et recherches anthropologiques, Mouloud Mammeri a recueilli et traduit des poèmes, des contes, des chants et élaboré une grammaire en berbère.
D. B.
La Nouvelle République 28 avril 2003 De la culture à la violence Par Boumediene A.
Il a suffi d’une interdiction en avril 80, celle de la tenue d’une conférence sur la culture amazighe par Mammeri pour provoquer le printemps berbère. Mouloud Mammeri avait été invité par les étudiants de l’université de Tizi Ouzou qui porte son nom, quand tout à coup des ordres sont venus gâcher tout : sa visite tant attendue, sa voix retentissante, son discours en langue châtiée. L’interdiction a été suivie de la pire des frustrations puis du soulèvement. Inutile de retracer le cours des événements sur le printemps berbère et le printemps noir devenus des événements historiques. La culture pour laquelle tout est arrivée, est le pur produit du génie d’un peuple qui a été privé de son écriture pendant des siècles. Cette culture est celle des ancêtres, celle qui a été véhiculée par l’oralité et qui a engrangé toute l’histoire, les pensées philosophiques et sociologiques. Le père de la sociologie Ibn Khaldoun, a dit des berbères qu’ils sont capables de vous raconter sans discontinuer toutes sortes d’histoires intéressantes, tant ils sont prolifiques. Et dans le tome 2 p. 49, des prolégomènes, le même Ibn Khaldoun cite les berbères en ces termes : “Chez les Zenata, une des nations du Maghreb, le poète marche devant les rangs et chante ; son chant animerait les montagnes solides, il envoie chercher la mort ceux qui n’y songeaient pas”.
De la poésie orale à la consécration
Cette poésie des anciens, brillante par sa haute tenue, mais anonyme et dont une bonne partie s’est effacée des mémoires faute d’écriture, a occupé une place importante dans les cœurs parce que porteuse de références. Malgré tous les obstacles, les guerres, les invasions, les épidémies, la société est restée dynamique, attachée à ses valeurs ancestrales, à sa langue et à sa culture ; c’est peut-être la langue et la culture qui sont restées attachées à elle. Pour en savoir plus, on va compulser une interview, celle dont nous disposons et au cours de laquelle Mammeri a été longuement interrogé par Bourdieu, parfait connaisseur de la poésie orale, écrivain de renommée internationale, ancien professeur à l’université d’Alger, après l’indépendance. A la question de savoir, quel itinéraire il a suivi pour arriver au domaine de l’oralité, Mammeri répond en se situant dans la lignée de la Tamusni : la connaissance, la sagesse ou la philosophie de la tradition orale. Dans sa société d’appartenance, ceux qui ont le privilège de détenir la connaissance exercent un ascendant sur les autres ; ils règlent les conflits à coups de légendes, d’anecdotes du vécu collectif moyennant un discours oral de bonne facture. La parole de l’amusnaw est légitime, chacun a le devoir de la prendre en considération surtout lorsqu’elle arrive bien à propos. Tel fut son père, un grand amusnaw formé au milieu des imusnawen, ses aînés. En effet, il est reconnu que son père a été un excellent élève dans son enfance ; il écoutait d’une oreille attentive, tout ce qui se disait entre les vieillards qui avaient mémorisé toute la tradition orale. On laisse Mammeri en parler : “Mon père a été l’avant-dernier dans la lignée de la tamusni. Il a eu un disciple, Sidi Louenas, qui est mort aussi. Et après eux, c’est quelque chose d’autre qui commençait : ceci est reconnu par tout le groupe, ce n’est pas une vision personnelle. Moi-même, je ne pouvais pas être le successeur de mon père, j’étais à l’université, j’avais donc déjà d’autres points de référence. Mais il n’en reste pas moins qu’il a eu toute sa vie, le souci de m’initier le plus qu’il pouvait. Je suis même en train de me demander si ce goût que j’ai très tôt pour la littérature, ne m’est pas venu de cette ambiance, dans laquelle je baignais sans même y penser, étant enfant”. Cependant, Mammeri n’est pas unique dans son genre. Bien d’autres écrivains de renommée internationale, ont eu aussi à s’intéresser d’abord à la langue et à la culture orale de leur terroir avant même d’aller à l’école. Nous en avons le meilleur exemple, celui de l’Egyptien Taha Hussein qui doit la beauté de ses œuvres, lui-même l’a avoué, à sa parfaite maîtrise de l’oralité. Aveugle à trois ans, il a commencé à fréquenter le monde des adultes, celui des femmes avec sa mère et celui des hommes en compagnie de son père. Il les entendait déballer ce qu’ils avaient emmagasiné comme poésies, légendes, anecdotes drôles, contes, proverbes, mythes anciens. Il écoutait d’une oreille attentive et il enregistrait grâce à sa mémoire prodigieuse. Toute cette littérature populaire lui a permis d’avoir une maturité précoce et d’aborder l’écrit sous d’heureux auspices, tant il a été enrichi considérablement bien avant de commencer sa carrière d’écrivain. Mammeri a beaucoup appris, lui aussi de son père et des imusnawen de toutes les tribus. Il le dit d’ailleurs si bien : “Lorsque j’étais encore enfant, mon père m’emmenait systématiquement dans les marchés parce que les marchés sont un lieu de rencontre privilégié. Le marché de mon père durait une demi heure et tout le reste du temps, il le consacrait à rencontrer des gens et rester avec eux ; eux en faisaient autant. Il y avait une espèce de formation sur le tas, à la fois consciente et diffuse. C’était un apprentissage par la praxis. Ce n’était pas un apprentissage abstrait. Il fallait aussi agir conformément à un certain nombre de préceptes, de valeurs, sans quoi la tamusni n’est rien. La tamusni est un art et un art de vivre, c’est-à-dire une pratique qui a des fonctions pratiques. Les productions qu’elle permet : poèmes, sentences ne sont pas de l’art pour l’art même si leur forme très recherchée peut le faire croire”. Mais la tamusni ne s’acquiert pas facilement, la seule école qui était offerte aux anciens fut celle de la vie, surtout de la vie professionnelle qui permettait le contact permanent avec les autres. Dans les Ath Yenni, à côté de ceux qui pratiquaient l’agriculture vivrière, il y avait beaucoup d’artisans comme le père de Mammeri, qui attiraient du monde venant même des tribus lointaines. Les visiteurs venaient faire réparer leurs fusils, acheter des outils, des ustensiles, des bijoux. On y venait même pour ferrer les bêtes de somme. Les échoppes devenaient des lieux d’échange langagiers. Parfois on s’y adonnait à de véritables joutes oratoires. La tamusni se transmettait de père en fi
Commentaire de Dj Sponk (04/12/2006 18:24) :
sponk.vip-blog.com
|
| |
|
|
|
|
|
|
|
Un artiste-peintre des Aurés (Algérie)
05/03/2005 21:15
Cherif Merzougui
Venir au monde, vivre, puis mourir c'est l'ordre de notre existence, mais mourir en laissant une belle oeuvre, c'est le rêve de tout être humain sensé et à plus forte raison de tout artiste peintre, le chantre des Aurés « CHERIF MERZOUGUI »
De son coup de pinceau décidé aux aurassiens et à la beauté de cette belle région, il signa ses plus belles toiles qui décorent depuis plusieurs années déjà des salles du club des pins de la présidence de l'hôtel el Aurassi ect.
Chérif Merzougui issu d'une modeste famille naquit le 02 février 1951 dans un petit village nommé « AMENTANE » près de Menaa, une daïra de la wilaya de Batna, dés sa tendre enfance il eut une passion fougueuse pour le dessin enfant. Il lui est arrivé de reproduire un dessin représentant la guerre des étoiles sur un des murs de la maison familiale. A sept ans la peine au coeur, Chérif quitta son village natal pour s’installer en compagnie de sa famille à Batna
A l école élémentaire ses cahiers d'écolier débordaient de dessins. Chaque trait, chaque courbe, chaque couleur disaient tant de choses sur AMENTANE Présente dans son coeur .
Lycéen, son merveilleux talent suscita l'attention de ses enseignants de dessin qui vivement l'encouragent. Il quitta alors le lycée pour s'inscrire à l'Ecole des Beaux Arts de Constantine qu'il fréquente entre 1969 jusqu'à 1972. Ensuite Chérif s’envola pour Alger afin d'étudier la décoration à l'Ecole des Beaux Arts.
Première fois, un nombre considérable de tableaux tels que « le petit berger » « le mariage » « l’équitation » …. Nombreux était le public venu admirer l'oeuvre de cet artiste venu des Aurés .
En 1983, il reçut le premier prix, lors du deuxième festival national des beaux art qui eut lieux à SOUK AHRAS pour son tableau « MARIAGE AURESSIEN ». Chérif Merzougui déclare un jour « l'artiste est une image qui se doit de refléter fidèlement la réalité »
Tantôt réaliste, tantôt expressionniste, c'est au coeur même de la réalité qu il se trouve et se découvre en nous faisant apprécier les paysages Aurassiens ainsi que la richesse et la valeur du patrimoine culturel notre artiste peintre aimait aller à la source des choses après le pinceau son second ami fut un appareil à photos qu'il trimbale partout et dans tous les endroits qu'il découvrait. Volontaire acharné, infatigable, tel était Chérif Merzougui. Tous ceux qui l'on connu se souviennent encore de sa richesse d’âme, sa douceur et sa gentillesse. Il n aimait guerre voir souffrir même dans les moments les plus difficiles. Il savait si bien rendre la joie et la sérénité, allant jusqu'à pardonner le mal qui lui venait des autres
In Lycos |
|
| |
|
|
|
|
|
|
|
La traversée de l'Atlantique?
04/03/2005 00:26
Les contemporains de Kéops ont-ils traversé l'Atlantique sur leurs voiliers ?
Toujours est-il qu'on retrouve des traces de cette technique de construction dans quelques vestiges comme ceux qui ont émergé des fouilles du quartier de la Bourse (emplacement du "Vieux Port" antique de Phocée, alias Marseille).
Hugues Journès et Yvon Georgelin ont consacré un ouvrage au personnage de Pythéas qui évoque la vie du héros Phocéen dont on ne connait les écrits qu'à travers les critiques acerbes qu'en firent des écrivains comme Strabon. C'est Pyhteas le Massaliote ( Puqeas o Massaliwths), contemporaine d'Alexandre le Grande et d'Aristote. Comme indiqué dans le livre les deux ouvrages de Pythéas De l'Océan ( Peri Wkeanou ) et Voyage autour de la Terre (Ghs periodos), hélas perdus, ont été lus et critiqués par nombre de savant pendant au moins six siècles. Tous le traitent de menteur. Ainsi Strabon, trois siècles après le périple de Pythéas écrit (Strabon, I , IV, 5):
- Puqeou plasmata - Puqeas anhr yeudestatos...
Traduction :
- Les pires inventions de Pythéas, l'homme le plus menteur...
Ce même Strabon l'accuse "de camoufler ses affabulations géographiques, mensonges qu'il a su couvrir de sa science de l'astronomie et des mathématiques" (Strabon, VII , III , I ).
Il est fort probable que les ouvrages de Pythéas ait été détenus dans la Grande Bibliothèque d'Alexandrie, détruite à trois reprises. En 48 av JC lorsque les troupes de Jules césar mettent le feu aux vaisseaux de Pompée, l'incendie se propageant aux dock et à la bibliothèque, au grand dam de Cléopâtre. En 390 de notre ère cette bibliothèque, qui vient d'être reconstituée par Théodose le Grand est de nouveau la proie des flammes. Enfin en 641 les restent furent détruit, sous l'ordre du calife Omar, disent certains. La seule chance de retrouver ces textes serait de pouvoir un jour explorer la bibliothèque d'Herculanum qui, ensevelie sous les cendres du Vésuve, gît sous le quartier populaire de Résina.
Coordonnées de la maison d'Edition de la Nerthe : 156 Allée des Roses, 83190 Ollioules. 04 90 94 63 13 98 nerthe@wanadoo.fr ISBN 2-913483-10-0. Je ne saurais trop vous inciter à faire l'acquisition de ce très joli ouvrage, illustré par l'archéologue-plongeur Jean-Marie Gassin, qui a possède joli talent d'aquarelliste et que je connais, de même que Georgelin (astronome, découvreur des deux bras supplémentaires de notre galaxie), de longue date.
On ne peut pas dire que le bateau Phocéen de l'époque (330-320 avant JC) ait eu une forme élancée. C'est une "coque de noix". Gassin nous fournit son plan de formes. La coque est munie d'un éperon. Il ne faut pas oublier qu'à cette époque la piraterie existait déjà. Même à bord des vaisseaux de commerce on trouve des armes, des casques. Les commerçants pouvait faire de très mauvaises rencontre et avoir à se défendre. Dans ces conditions, l'éperon était une arme défensive efficace contre des embarcations plus légères.
Les illustrations montrant les vaisseaux antiques sous voile sont rares. En voici une, présente sur un bas-relief.

Mosaïque du musée Bardo, à Tunis, représentant Ulysse et ses sirènes, daté du III° siècle après JC, 6 siècles après le périple de Pythéas
On voit que la voilure principale, enverguée sur un mât placé au centre du bâtiment est complétée par une seconde voile, le dolon. Un navire antique a été reconstitué, basé sur l'épave du Kyrénia, dont l'épave a été trouvée au nord-ouest de l'île de Chypre, en 1968. Longue de 14,5 m elle est datée du IV° siècle avant Jésus-Christ. L'allongement d'un tel navire est de 3,62, ce qui lui donne une largeur de 4 m. Les archéologues on construit un navire semblable, le Kyrenia II qui a parcouru à titre expérimental 1280 miles marins. Vitesse moyenne : 3 noeuds. Par vent farorable la vitesse atteinte a été de 10-12 noeuds (soit 120 km par jour). Bois à forte densité : cèdre, mélèze, accacias. Les archéologues ont pu constater la relative inefficacité d'une navigation à la rame, sur un bateau aussi lourd, concluant que celles-ci devaient plutôt être utilisées lors de manoeuvres portuaires ou par calme plat.
Par gros temps on réduit la voilure en utilisant 6,8 ou 10 filins, passant par des anneaux de cargue. J'en ai moi-même retrouvé un certain nombre sur des épaves marseillaises sur lesquelles je plongeais dans les années 55-60, comme celle du Grand Congluë, à l'époque où mon ami Yves Girault s'occupait des fouilles. Ces anneaux sont en général en plomb. La voile avant est appelée dolon. Elle était pratiquement indispensable pour les virements de bord, celle-ci étant bordée "à contre". Sinon le bateau perd sa vitesse, s'arrête complètement et même "cule".

Virement de bord d'un navire Grec avec dolon bordé à contre

A l'arrière vous distinguez le gouvernail babord. Le bois sur lequel il est fixé ne le traverse pas par son milieu, mais à 25 % de sa "corde". C'est le lieu du "foyer" de cette "aile". Les anciens étaient loin d'être des idiots et avaient remarqué qu'avec un tel montage l'effort à faire, pour braquer la gouverne était minimal.

En haut, à droite, les anneaux de cargue. Les auteurs, qui ont voulu reconstituer le navire de Pythéas ont imaginé que les marins pourraient prendre place sur des bancs de nage et glisser leurs rames par des orifices qui seront fermés par tempête. La circulation de l'avant à l'arrière s'effectue par un couloir surélevé, bien visible sur le dessin. La partie médiane du bateau peut être recouverte par une toile protégeant du soleil ou des intempéries. Les bois sont assemblés par un jeu de clés enfoncées dans des mortaises. Les auteurs écrivent " A cette époque il semblerait que l'assemblage des virures de bordé ne comporte plus de coutures, abandonnées au profit du chevillage".
Ces bateaux sont munis d'une quille, qui encaisse les efforts en flexion, et de couples.

La coque proprement dite est constituée de plaques de bois, de virures assemblées par ensembles clés-mortaises, les clés étant verrouillées à l'aide de chevilles.

A l'arrière la quille est prolongée par un étambot qui se redresse comme un arc. Alors que la proue du naviire est conçue pour "fendre la mer" en plongeant profondément dans les lames dans son mouvement de tangage, la poupe est dessinée de manière à permettre une allure en fuite en cas de tempête.

Elle est à cet effet surélevée, "défendue". Elle est relativement arrondie. Lorsqu'une vague déboule par l'arrière la force d'Archimède s'accroît et cette poupe se soulève. Gassin nous donne, sur la quatrième de couverture de l'ouvrage l'allure de tels vaisseaux, vus par l'arrière.
Sur la couverture, une vue par l'avant, au port.

Il s'agit de bateaux destinés à la navigation hauturière, loin de leur port d'attache. Ce sont aussi des (petits) bateaux de commerce, de faible tonnage. Pythéas est censé être monté très au nord, jusqu'au voisinage de l'Islande, région où il aurait observé des choses incroyables pour les Grecs. Des fortes marées, de cinq à six mètres d'amplitude, inconnues en Méditerranée, qu'il attribue ... à la Lune. Il observe le Soleil de minuit et un état incroyable de la mer où celle-ci (commençant à geler) prend une allure intermédiaire entre l'état liquide et l'état solide. Au delà, elle devient ... solide et on ne peut ni naviguer, ni marcher sur ce supporte : la banquise, qu'il est le premier Méditerrannéen à découvrir. Le livre rédigé par Pythéas, contant son périple, fut perdu. Nous n'en possédons que des commentaires moqueur émanant de l'historien Strabon. Selon celui-ci le récit de Pyhtéas n'est qu'une "histoire Marseillaise".
Les vaisseaux de guerre, des galères, sont différents, élancés, conçus pour être rapides. Armés d'un éperon de bronze, les trirèmes peuvent atteindre 35 mètres de long , et accueillir 170 rameurs, sur trois niveaux de bancs de nage, filant à 8 noeuds en cadence d'attaque et d'abordage (15 kilomètres à l'heure). Ces unités ne sauraient être utilisées pour des voyages à très grande distance, ne serait-ce qu'à cause des problèmes posés par l'entretien des quelques 200 hommes constituant à la fois la force motrice et l'armement du navire.
Les vaisseaux de commerce, selon la reconstitution fournie dans le livre ne sont pas pontés. Leur flanc doit donc être assez haut sur l'eau pour éviter qu'en cas de tempête" ils n'embarquent". Proue et poupe sont également assez élevées pour éviter aux lames déferlante de les submerger. Tout ceci crée un "fardage", donne une forte prise au vent, diminuant les performances au près, lorsque le bateau remonte le vent. Il n'y a guère de différence entre ces navires du III° siècle avant Jésus Christ et ce que produiront des siècles plus tard les architectes navals de l'époque médiévale.
| |
|
|
|
|